Cette page était sur le site de F5RUJ; mais le lien ayant disparu, j'ai reproduit ici l'article que j'avais conservé. (F5AD)
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A la recherche des avions perdus

Des antennes pour les recherches de balises

Aimez-vous les films d’aventure? Avez-vous la nostalgie des grands jeux des colonies de vacances de votre jeunesse? Avez-vous envie de faire acte de civisme tout en pratiquant votre passe-temps favori? Le téléphone qui sonne à 23 heures, un jour férié de préférence vous cause-t-il une "poussée" d’adrénaline? Aimez-vous, à deux heures du matin, un soir d’hiver, debout dans une aérogare déserte et glacée d’aéroport de province, boire du café de distributeur automatique dans des verres en plastique avec un pilote de "jet" sorti hâtivement de son lit, sans cravate, un copilote qui n’a manifestement pas trouvé son peigne et de bons copains déguisés en pompiers ou bardés de bandes fluorescentes (sécurité oblige)? Si vous répondez oui à une seule de ces questions vous faites certainement partie de la section locale de la FNRASEC, c’est à dire des Radioamateurs au service de la Sécurité Civile. Sinon hâtez-vous d’y adhérer, les émotions, voire les aventures, sont garanties! Même les "écouteurs" peuvent participer de façon très active: le travail se faisant toujours en équipe, il n’est besoin que d’une seule personne pour effectuer les transmissions.

Une des activités des RASEC consiste en la recherche de balises d’ aéronefs en détresse dans le cadre du plan SATER (Sauvetage aéroterrestre). Pour cela, tous les avions et hélicoptères sont pourvus d’un émetteur à déclenchement manuel et automatique (détecteur de choc). Lorsqu’elle est active, cette balise émet un signal sur 121.5 et sur 243 MHz, modulé en amplitude (AM). Certaines, plus anciennes (et hors normes), n’émettent que sur 121.5 MHz. La fréquence d’exercice des RASEC est 121.375 MHz.

Le rôle des radioamateurs est de retrouver les aéronefs en détresse au sol si les Gendarmes ne les ont pas repérés "de visu". Heureusement, il n’y a pas souvent d’avions accidentés en Haute-Vienne et jusqu’alors nous ne sommes intervenus que pour des incidents, c’est à dire des déclenchements intempestifs de balises qui se produisent, bien entendu, suivant la loi de Murphy dite aussi de l’ "emm..." maximum, le soir tard quand il fait froid et que le Président de l’ADRASEC est absent de son domicile. (Mais on a tout prévu, ou presque!)

Avec l’expérience, nous avons maintenant des repères. Si Pierre (F5TIM) pense que les copains ont caché un petit émetteur dans sa poubelle pour lui faire une farce tellement le signal est puissant, c’est la balise de l’hélicoptère de l’hôpital qui est en route. Sinon, nous allons tout droit à l’aéroport de LIMOGES BELLEGARDE. Parfois, dès l’entrée du parking, nous entendons la balise S9 SANS antenne connectée au récepteur. On peut alors aller directement au service de sécurité chercher la clef des hangars. Le plus difficile reste à faire qui est de déterminer le bon avion, vu la force du signal! Bernard (F1SRS) et Olivier (F4IFZ) sont devenus des champions de ce sport, alors, nous, on papote en attendant!

Si, parfois, il arrive qu’un petit avion "aille aux vaches" sans trop "casser de bois", le téléphone portable et la sagacité gendarmesque font que nous ne sommes pas contactés. Le pire est quand le satellite de surveillance "n’entend" que le 243 MHz. Dans ce cas on ne trouve jamais rien et deux heures et 70 Km de routes de campagne plus tard on nous annonce la fin d’alerte, le signal semblant s’être déplacé vers Angoulême ou Cognac... Allez savoir pourquoi, nos questions restent alors toujours sans réponse.

J’espère vous avoir donné l’envie de rejoindre nos rangs, mais mon propos principal est plus technique. Pour rechercher ces balises, il faut des récepteurs et des antennes. Pour ce qui est des récepteurs, chaque association locale a des solutions: récepteurs spécifiques (COMELEC), transverters, postes à couverture générale (Autorisation possible dans le cadre des RASEC). En ce qui concerne les antennes, nous en avons expérimenté de toutes sortes, des plus simples aux plus étranges, y compris une immense "Quad" fixée sur le toit d’une automobile! Notre département étant très vallonné, d’altitude variant entre 250 et 850m environ, il constitue un bon laboratoire d’expérience pour les antennes de recherche. Je vais vous décrire les antennes que je possède, sachant qu’en ce domaine il y a d’ autres possibilités en grand nombre.

Le cahier des charges

Exposé du problème: Un signal étant perçu dans un cercle de 20 km de côté, il s’agit de trouver dans un temps le plus court possible la source du signal. Pour ce faire, le PC radio envoie trois équipes (au minimum) à la circonférence du cercle, en des points bien choisis, puis les déplace au fur et à mesure de l’avancement de la recherche. Chaque équipe essaie de percevoir le signal de la balise à l’aide de récepteurs munis d’antennes directives à gain. Par triangulations successives encadrant de mieux en mieux le lieu présumé, nous arrivons toujours en une heure environ à trouver l’émetteur.

Quelles antennes:

Pour la recherche de balise

  • Une antenne directive avec grand gain mais transportable dans un coffre de voiture
  • Une antenne non directive: pour écouter la balise même en roulant lorsqu’on se rapproche.
  • Une autre antenne directive mais de taille réduite pour être utilisée depuis le véhicule, sans  avoir besoin de descendre.
  • Une antenne de proximité directive sur l’harmonique 3, un atténuateur.
  • Pour communiquer avec le PC

    Nous ne traiterons que des antennes destinées à la réception de la balise (121.5 MHz).

    Elements théoriques

    L’antenne omnidirectionnelle en quart d’onde:

    La fréquence 121,5 MHz a pour longueur d’onde environ 2,47m. Après correction (facteur de vélocité) le quart d’onde se situe aux alentours de 0,586 m. La longueur des radians serait de 0,588m, mais le plus souvent le plan de sol sera constitué par la carrosserie de l’automobile. Il faut faire attention si l’on utilise une embase magnétique qui effectue un couplage capacitif. Dans notre cas, le fouet sera plus long. Le mien mesure 63 cm.

    Il n’y a pas grande difficulté à fabriquer un tel quart d’onde à partir d’une prise de type "PL" (Voir Mégahertz Magazine n° 191 page 36). Cette antenne est très utile car elle permet d’écouter en permanence, même en roulant. Il est possible d’avoir effectué diverses écoutes improductives avec l’antenne directive, puis au détour d’une vallée, brusquement, on perçoit faiblement le signal. C’est le moment de stopper le véhicule sans plus attendre pour effectuer une mesure avec l’antenne directive.

    Les antennes directives

    Trois types ont retenu notre attention. Il ne s’agit pas de nouveautés mais d’antennes prévues la bande 144-146 MHz, décrites dans divers ouvrages ou revues et dont les dimensions ont été adaptées pour la bande aviation. Pour toutes, nous avons vérifié leur efficacité sur le terrain. Nous n’exposerons pas la théorie du fonctionnement de ces antennes que vous trouverez dans les ouvrages spécialisés. Le prix de ces antennes est minime, surtout si l’on peut récupérer des éléments d’antennes TV hors d’usage.

  • L’antenne HB9CV démontable à 4 éléments: Elle a l’avantage de la directivité et du gain, mais sa construction est plus délicate car le "boom" doit pouvoir se démonter afin de pouvoir loger dans un coffre de voiture. Pour l’utiliser il est nécessaire de sortir du véhicule et de la monter: elle sera utilisée pour la détection à longue distance.
  • L’antenne dipôle avec un élément parasite, dite "Patte d’oie": Taillée sur la fréquence 243 MHz, elle est utilisable sans descendre du véhicule dans les derniers kilomètres. Elle permet ainsi de choisir la bonne direction lorsqu’on arrive à un croisement routier!

    L’antenne YAGI 5 éléments taillée sur l’harmonique 3: Lorsqu’on arrive dans les derniers hectomètres, on reçoit la balise SANS antenne et pourtant il va falloir faire une recherche dans un bois ou... dans un hangar abritant une dizaine d’avions. Même à 20m de la balise la directivité est assurée.

    Détails de fabrication

    Souvent les articles techniques ne donnent que des bases et des schémas théoriques (que l’on peut trouver dans des dixaines d’ouvrages!), sans préciser les détails de construction.

    Nous qui sommes de modestes bricoleurs, nous voulons AUSSI savoir comment l’auteur a fait pour assembler les "morceaux" de son antenne, savoir si tel élément est isolé ou à la masse, si l’on trouve la matière première dans les magasins de bricolage, etc. Le débutant se pose mille questions qui peuvent sembler faussement évidentes à un "spécialiste" et dissuader le nouvel OM de construire le montage décrit. Lorsqu’on écrit un article technique aussi simple que la (re)description d’une antenne, il faut penser que l’on s’adresse surtout à des OM ayant peu d’expérience, sauf bien entendu s’il s’agit d’un prototype révolutionnaire!

    La HB9CV 4 éléments démontable:HB9CV 4 éléments

  • Le boom: J’ai utilisé un boom d’antenne TV démontable. Les photos permettent d’observer comment cela fonctionne mieux qu’une description.
  • Les éléments: En tube d’aluminium de 6mm puis en baguette de 4mm entrant en force. Ils sont rendus solidaires du boom par des vis Parker. Mon prototype comporte des éléments démontables mais je ne n’utilise jamais cette possibilité qui ferait perdre beaucoup de temps. Bien entendu ils ne sont pas isolés du boom. C’est une antenne dite "tout à la masse".

    Les lignes de déphasage et le gamma d’adaptation: Ils sont fabriqués à partir de baguettes de brasure pour le cuivre. Ils sont fixés sur les éléments grâce au par des cosses à souder vissées dans les tubes d’aluminium. Le système que j’ai employé est inutilement complexe! Ils sont écartés du boom d’environ 5mm par des isolateurs taillés dans du plexiglass ou tout autre isolant de récupération, collés et maintenus par de l’adhésif d’électricien. Les deux lignes de déphasage sont bien entendu identiques et fixées de part et d’autre de l’antenne de façon symétrique.

    Le condensateur de liaison: est constitué par un morceau de coaxial 6mm de 15cm environ, coincé entre le gamma et l’élément qui le supporte. En faisant varier expérimentalement sa position, on peut arriver à obtenir un ROS de 1:1 mesuré à l’analyseur d’antenne. (N’émettez surtout pas sur cette fréquence!). Honnêtement, comme il s’agit d’une antenne de réception, il n’est pas nécessaire d’acheter un analyseur d’antenne pour cela. Le "pifomètre" et l’expérimentation sur le terrain sont suffisants.

    Le support: J’ai utilisé un système de fixation d’antenne TV. Comme j’utilise cette HB9CV en polarisation verticale, le mât est fabriqué en tuyau PVC de 32mm. Il est coupé à une longueur équivalente à celle des éléments et muni d’un manchon de raccordement femelle/femelle. De cette façon l’antenne ne tient pas trop de place quand elle est démontée. Une rallonge d’ 1m environ sera utilisée sur le terrain. Si l’on veut utiliser un mât de plus haute taille, le mât de planche à voile (éventuellement démontable) est tout à fait pratique. Il suffit de travailler le tuyau de PVC à l’air chaud pour fabriquer un emboîtement au sommet du mât.

    La Patte d’oie (Placée à l’envers on dirait une patte d’oiseau avec ses 3 doigts) Patte d'oie

  • Le dipôle et l’élément parasite: Il sont fabriqués à partir de baguettes de brasure. Je recommande de façonner un petit oeillet à l’extrémité afin de ne pas se blesser... aux yeux, justement!
  • La tête isolante: Je l’ai taillée dans un morceau de plexiglass, percée pour laisser passer les éléments qui sont collés à la colle cyanocrylate. Le "manche" est fabriqué à partir d’un tube plastique servant en électricité pour le passage des fils. Il s’enfonce en forçant dans la tête où une goutte de colle le maintient. Je l’ai fait repliable, mais c’est du luxe!

    La Yagi Harmonique 3 Harmonique 3

  • Le boom: J’ai utilisé un carré d’aluminium de 15mm trouvé en magasin de bricolage et je l’ai muni d’embouts en platique achetés au même endroit. Il n’y a pas de support, je tiens le boom à la main, par l’arrière.
  • Les éléments: Ce sont des morceaux d’aluminium de 4mm taillés à la bonne longueur. Ils sont isolés du boom et maintenus dans les supports par de la colle thermoplastique. (Ou autre)

    Le dipôle: Il est réalisé en laiton de 4mm afin de pouvoir en souder aisément les extrémités du coaxial. La colle thermoplastique assure une bonne protection des soudures contre les intempéries.

    Les supports isolants: Il est assez facile de récupérer auprès des professionnels des antennes de TV hors d’usage et donc des isolateurs et des systèmes de fixation. A l’origine ces isolateurs étaient en forme de "X" supportant 4 éléments en aluminium à l’extrémité des branches du "X". Je les ai alors coupés en deux, conservant la partie destinée à les visser sur le boom. J’ai préféré traverser complètement ce dernier avec un système vis/rondelle éventail/écrou, car les vis à tôle ne tiennent pas bien en raison des manipulations de cette antenne.

    Essais comparatifs sur le terrain Essais comparatifs avec Jean-Michel (F1TBS) et Gilbert (F5AUZ)

    En conclusion:

    Qui donc a dit qu’il n’y avait plus rien à construire en matière de radioamateurisme? S’il est certes difficile d’innover ou de rivaliser avec les meilleures fabrications commerciales, il est des réalisations que le bricoleur moyen peut mener à bien sans trop de difficultés et surtout à moindre frais, particulièrement dans le domaine des antennes. Aucun amateur ne peut prétendre fabriquer un émetteur-récepteur aussi perfectionné que ceux du commerce. Je reste pourtant persuadé, surtout dans le domaine de la HF, qu’un poste construit par un amateur soigneux lui permettra d’ effectuer autant de QSO que s’il avait le dernier appareil sorti des usines japonaises, surtout s’il utilise des modes de transmission aussi efficaces que la CW. Je ne pense pas qu’une canne à pêche en carbone permette de prendre plus de poissons qu’une autre en fibre de verre, voire en bambou refendu. La seule différence est dans le confort du pêcheur... et le plaisir de posséder un bel objet, voire de faire "bisquer" les copains!

    En revanche on pourrait se poser les questions suivantes: le radioamateur "nouveau" a-t-il le temps et surtout le désir de construire? Quel type de radioamateur veut-on "fabriquer" avec un diplôme totalement intellectuel que l’on peut obtenir sans jamais avoir touché un fer à souder de son existence?

    Dans une entreprise il faut des ingénieurs et des techniciens. Je lis un peu partout que nous n’avons pas assez de radioamateurs. Certains voudraient brader le diplôme. Ce n’est pas mon avis, mais il serait certainement intéressant de recruter de bons techniciens, même s’ils s’embrouillent un peu dans les logarithmes. Un SWL membre de notre association locale m’a dit un jour: "Quand j’étais à l’armée, je commandais une station d’émission qui faisait 1 kW au moins. Maintenant je ne peux même pas en utiliser une de 10 watts..." Ferait-il un si mauvais radioamateur? Et pourtant il est toujours SWL.

    Alain CAUPENE

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